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Panorama des dépendances énergétiques européennes

Entre 2001 et 2012, la dépendance énergétique de l’Union (1) est passée de 47 à 53 % – toutes sources d’énergies confondues. Cette donnée chiffrée a le sens qu’on veut bien lui prêter tant les situations nationales diffèrent ; a minima il est possible de dire que l’Union européenne est aujourd’hui plus dépendante de ses fournisseurs d’énergie car certains de ses membres creusent leur déficit énergétique plus vite qu’il ne peut se combler. Cette dépendance augmente alors même que la consommation d’énergie recule puisqu’il manque 148,4 millions de tep en 2012 par rapport au maximum de consommation de 2006 (2).

La dépendance énergétique en Europe

« La dépendance énergétique montre le degré jusqu’auquel une économie dépend des importations pour faire face à ses besoins énergétiques. L’indicateur est défini comme le ratio entre les importations nettes et la somme de la consommation intérieure brute d’énergie et des réserves. » (Eurostat)

Europe_energie_dependance

Les plus forts taux de dépendance concernent les États dépourvus d’hydrocarbures, de charbon, d’électricité d’origine nucléaire et faiblement dotés en parc hydroélectrique. C’est le cas des îles, Chypre et Malte en tête. C’est également le cas de l’État le plus peuplé de l’Union, l’Allemagne, qui avec ses 80 millions d’habitants est dépendant à 61% sur le plan énergétique. Parmi les États plus faiblement dépendants, on trouve la Roumanie qui dispose de pétrole, de charbon, d’énergie nucléaire et hydroélectrique et dont la consommation est à peine supérieure à celle de l’Autriche presque trois fois moins peuplée (3). Le Danemark est le seul État de l’Union en capacité d’assurer globalement son indépendance énergétique grâce à ses ressources pétrolières et gazières, auxquelles s’ajoute une stratégie de diversification de longue date (éolien et biomasse) et de consommation raisonnée (4).
L’indépendance renvoie tantôt à des choix stratégiques de production et d’économie, tantôt à des réalités socio-économiques liées au mal-développement – s’éclairer à la bougie ou circuler en charrette réduit la consommation énergétique.

Évolution de la dépendance énergétique

RVB de base

Effort vers l’indépendance et/ou effort vers la transition énergétique ? Et pour quelle transition énergétique, à quelle échéance ? Voilà les questions que suscite la carte s’agissant de Lituanie à 80% dépendante en 2012 et dont l’adhésion à l’UE fut conditionnée à la fermeture de sa centrale nucléaire (centrale de modèle soviétique). La Lituanie est ainsi passée de 46 % de dépendance en 2001 à 80 % en 2012. L’Estonie est pour sa part l’un des leaders mondiaux historiques (depuis 1916) de schistes bitumineux qui comptent pour 70 % de ses approvisionnements, et elle a réduit sa dépendance énergétique de 32 % à 17 % entre 2001 et 2012. Mais pour quel « bilan carbone » ? (5)
Le Royaume-Uni (64 millions d’habitants) ressort comme l’un des États européens qui ont le plus reculé sur le plan de l’indépendance énergétique, passant de – 9 % en 2001 (une position d’exportateur donc) à 42 % de dépendance en 2012, la bascule s’effectuant entre 2003 (– 7 %) et 2004 (5 %), dans la foulée de l’intervention en Irak.
Enfin, l’Allemagne a légèrement accru sa dépendance (+ 0,20 points) même si sa consommation a reculé de 30 millions de tep (6).

Des pistes pour aller plus loin :

Il serait intéressant d’étudier le mix énergétique des États (consommations et réserves) pour peu que les données soient disponibles afin d’interpréter certains choix stratégiques en matière de diplomatie (ex. Russie…), de Défense (ex. OPEX et OTAN…), de relations commerciales (ex. Chine, Brésil…) et de développement durable (ex. biomasse et PAC….). Un pays peut très bien paraître autosuffisant au regard de ses ressources (gaz, pétrole, charbon, nucléaire, etc.) et décider de les exporter parce qu’il les valorise mieux à l’extérieur, ou d’en importer pour conserver ses stocks pour les placer à l’avenir sur un marché qu’il imagine tendu à plus ou moins long terme.
Tout cela au travers des enjeux quotidiens des discussions au sein de la Commission européenne. Vaste programme…
En outre, l’unité tep recouvre des réalités très différentes. Toutes les sources d’énergie ne possèdent pas les mêmes pouvoirs calorifiques : ainsi une tep correspond à 1 616 kg de houille, 1 069 m3 de gaz d’Algérie ou 954 kg d’essence moteur. Et l’équivalence avec l’électricité s’avère assez complexe à suivre.

Sophie Clairet

Image du haut : Capture d’écran du film de la Commission européenne dédié à la sécurité énergétique en Europe. Faut-il s’émouvoir d’une esthétique vintage américaine sur ce sujet ? (CE)

Notes :

(1) Sur la base de l’UE 28. Données Eurostat, page consultée le 30 avril 2014.
(2) Pour donner un ordre d’idée, la consommation de l’Espagne pour l’année 2012 s’établit à 127,3 millions tep et celle du Portugal à 22,2 (Eurostat). Entre 2007 et 2012, la consommation d’énergie dans l’UE28 a quasiment reculé de ce qu’ont consommé l’Espagne et le Portugal réunis en 2012.
(3) Consommation de la Roumanie en 2012 : 35 370 300 tep, de l’Autriche : 33 654 900, population de la Roumanie : 21,4 millions, de l’Autriche : 8,4 millions.
(4) En effet ce petit pays de 5,6 millions d’habitants (deux tiers de la population autrichienne) consomme presque moitié moins d’énergie (18 140 000 tep en 2012) que l’Autriche.
(5) A propos des débats autour de la pollution liée aux schistes bitumineux en Estonie, voir notamment la page de l’AIE.
(6) Hormis dans une poignée de pays peu peuplés (Pays-Bas, Autriche, Pologne, Estonie) où elle dépasse en 2012 celle de 2001, la consommation énergétique a reculé dans l’ensemble de l’UE28.

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