Catégories
Articles

Art & Drive, les nouveaux usages détournent les « malls »

Les nouveaux malls ressemblent aux autres, mais pas seulement. Flâner à Muse qui a ouvert à Metz fin novembre peut réserver quelques surprises pour qui s’attendait à ne trouver qu’un alignement d’enseignes identiques à celles qui s’alignent ailleurs. Elles sont bien là, mais quelque chose a changé, elles ne sont plus au cœur du sujet, non plus que l’art qui s’affiche tant.

Ce n’est plus la FNAC, comme du temps de Beaugrenelle et consorts, qui doit faire se déplacer les chalands mais Primark. L’enseigne irlandaise fondée en 1969, et présente en France depuis 2013, associe flux tendus (turn-over très important des collections), bas coûts et faibles marges grâce à des économies sur les plans de communication notamment, sur la main d’œuvre toujours et les impôts systématiquement – siège social basé à Dublin.

À l’étage -2, dans le prolongement des accès piétons de la zone verte du parking (celle qui occupe le sous sol « central » de Muse car débouchant sous l’accès à Primark), sont installés les casiers de livraison Amazon. Quand on lit « commandez sur Amazon, retirez vos colis ici », on tourne le dos à l’entrée du Carrefour Market de 5700 m2, on est dans « Le salon des Muses ».

Ce salon des Muses, c’est l’aboutissement des flux tendus et du fret mondial, la sortie d’un tunnel de production directement greffé à un bassin de chalandise évalué à un secteur de 60 km par le président d’Apsys, Maurice Bansay.

Amazon Muse Metz
Cliché pris du puits occupé par des escaliers roulants, entre l’étage -2 et le rez-de-chaussée. Cliché Sophie Clairet, 2 décembre 2017

Au rez-de-chaussée, direction la « Bibliothèque des Arts » : « La majestueuse Bibliothèque des Arts en chêne clair, dessinée par Jean-Paul Viguier, invite à une pause onirique dans le parcours de visite de Muse. Située en face de la place d’O, elle accueille objets réels et écrans, au sein d’un espace propice à la convivialité. » (Dossier de presse)

La Bibliothèque des Arts, Muse à Metz. Cliché Sophie Clairet, le 2 décembre 2017.

Un vaste pan de boiseries enchâssé d’écrans, avec au centre, une mosaïque de 16 écrans qui donnent à voir des livres et des objets scintillants. D’autres écrans de part et d’autre enchaînent des annonces Amazon, La Poste, de l’art pour les enfants à l’étage.

Détail de la Bibliothèque des arts, Muse à Metz. Cliché Sophie Clairet, 2 décembre 2017

De loin déjà, les livres jaunes se détachent : ils appartiennent au monde de Muse et concernent ses architectes. L’interface invite à les toucher et les ouvrir. Mais il est impossible d’activer un autre livre, par exemple Art During peace time, impossible de sortir du tube programmé.

Là, tout n’est qu’ordre et beauté
Luxe, calme et rigidité (L’invitation au fake, Charles Beau de l’air)

Finalement, Muse c’est un port où arrivent les cargaisons et où les panneaux subliminaux (écrans) conduisent aux quais que sont Primark, Amazon, La Poste. Tout au long des accès, des enseignes classiques de l’ancien monde dépannent, décorent et donnent de la vie. L’air pulsé est parfumé, en ce moment des fragrances de bois prennent le dessus, on pense au sapin.

Le centre-ville a toutes ses chances d’y survivre moyennant une stratégie centrée sur l’humain, la production vertueuse, voire française/locale/lorraine. On y respire de l’air non parfumé et les vigiles ne stationnent pas aux extrémités de ses artères pour ouvrir les sacs. C’est toute la différence entre la cité et un espace privé. À nous de choisir, mais il y a un vrai choix à faire.

Sophie Clairet

Nota :

Extrait : Challenge : « Pour Maurice Bansay, président fondateur d’Apsys, ce n’est pas une question de saturation commerciale, mais de renouvellement de l’offre. « Nous apportons des marques comme Primark, qui n’existaient pas dans la région, nous redynamisons tout un centre ville. Et surtout… nous n’avons pas le choix : nous faisons face à une concurrence redoutable, celle de géants comme Alibaba et Amazon, auxquels il faut apporter une réponse… et cette réponse c’est Muse », assure Maurice Bansay. »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *