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GeoImage, la très haute définition et son décryptage à notre portée

Il y a dix ans, des images satellites d’une telle qualité étaient réservées aux militaires. Aujourd’hui, les clichés des satellites Pléiades (1) passent les portes des cours de géographie pour apporter les indices visibles depuis l’espace des mutations de nos sociétés. Une véritable révolution technologique que de rendre accessible la très haute définition : en 70 cm de résolution, un cliché de 20 km sur 20 km pèse 16 gigaoctets. Jusqu’à présent les contraintes techniques étaient restées maîtresses du jeu.

Soucieux d’ouverture des données, les géographes Laurent Carroué et Vincent Doumerc ont trouvé l’astuce. Ils viennent de présenter au FIG de Saint-Dié la naissance de GeoImage, le portail de cette initiative commune du CNES et de l’Éducation nationale. Objectif : communiquer des photos satellites retravaillées, et une sélection de zooms, accompagnées de fiches descriptives destinées aux cours de géographie et à la préparation des concours. Mais cela ne fait de mal à personne de voyager intelligemment.

Voici trois aperçus à des échelles différentes pour saisir les très nombreuses richesses de ce portail amené à s’enrichir chaque jour sur la base de contributions volontaires des géographes. Pas besoin de login, la compréhension des images est à vous…

Une perle de Polynésie française, Bora Bora, pour tous les yeux

Bora-Bora, l’une des îles de l’archipel de la Société en Polynésie française. Cette image est présentée dans l’article « Bora-Bora : la mise en tourisme d’une île de Polynésie française »

Prise par un satellite Pléiades le 5 février 2012, cette image est en couleurs naturelles (résolution native à 0,70m, ré-échantillonnée à 0,5m). © CNES

Pour mieux comprendre l’organisation de l’espace, il suffit de dérouler la fiche, de se promener dans les zooms.

Déroulé des zooms sur Bora Bora. Chaque zoom est chargeable en haute définition.

Lire les paysages géopolitiques autrement

On entrera dans les paysages géopolitiques par une thématique « Géopolitique et stratégie » à cette adresse : https://geoimage.cnes.fr/fr/thematiques.

Zoom sur la vieille ville politique et administrative d’Oulan-Bator, capitale de la Mongolie présenté dans la fiche « Oulan-Bator : mutations économiques et urbaines et sédentarisation des éleveurs nomades des steppes ». Ce cliché permet notamment de comprendre l’organisation du pouvoir et des influences pendant la guerre froide (ambassade d’URSS puis de Russie en limite gauche de la carte le long de l’avenue de la Paix, entourée de vastes espaces verts tout à côté du palais présidentiel), et depuis (ambassade de Chine, le point brillant tout près du campus universitaire).

Prise par un satellite Pléiades le 31 mai 2014, cette image est en couleurs naturelles (résolution native à 0,70m, ré-échantillonnée à 0,5m) © CNES.

Ouvrir ce site et s’intéresser à ces images décodées, c’est participer à une nouvelle communauté en cours de constitution. Des ponts sont déjà lancés à travers le monde, par le biais des lycées français notamment. C’est aussi s’intéresser à un volet important de la politique étrangère de la France, puissance spatiale. Selon les informations diffusées par le CNES (2) en avril 2018, « Avec 37 € par an et par habitant, le budget que la France consacre aux activités spatiales civiles est le 2e au monde, après celui des États-Unis, mais avant ceux de la Chine, de la Russie ou du Japon. » Il compose l’un des deux premiers piliers de l’Agence spatiale européenne, et l’un des principaux contributeurs au projet COPERNICUS qui veille sur notre environnement.

Principaux pays contributeurs au budget de l’ESA en 2018 (3) :
France (24,2 %)
Allemagne (23,1 %)
Italie (11,8 %)
Royaume-Uni (8,4 %)
Belgique (5,1 %)
Espagne (5,2 %)
Suisse (3,8 %)
Pays-Bas (2,3 %)

Notes:
(1) https://pleiades.cnes.fr/fr
(2) https://cnes.fr/fr/web/CNES-fr/11507-le-2eme-budget-au-monde.php
(3) http://www.esa.int/About_Us/Welcome_to_ESA/Funding

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Derrière les images de la neue Altstadt de Francfort

Alors cette nouvelle Altstadt, « nouvelle vieille ville », une simple antiphrase ancrée dans un passé poussiéreux ou une antithèse fondatrice ? Dans la course entre métropoles européennes pour séduire les sièges sociaux qui devraient quitter Londres post-Brexit, Frankfort prend le parti de continuer à recréer l’ancienne ville détruite lors des bombardements alliés de la Seconde Guerre mondiale. Autrement dénommé Dom-Römer[1] (cathédrale – Römerberg), le projet a rayé de la carte des bâtiments techniques municipaux des années 1970. Autrement dénommé Dom-Römer[1] (cathédrale – Römerberg), le projet a rayé de la carte des bâtiments techniques municipaux des années 1970. Les premiers habitants s’installent depuis mi-mai après six ans de travaux, le premier commerce vient d’ouvrir en juin. Francfort invite les touristes saoudiens à venir visiter ce nouveau quartier[2], avant l’inauguration officielle prévue du 28 au 30 septembre.

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Persistance rétinienne : ces précieux panneaux qui jalonnent nos routes

Allons d’un point A à un point B, durant ce trajet, représenté par une ligne sur nos cartes, le paysage porteur de messages défile sous nos yeux.
De part et d’autre de la route, il y a l’espace rural, urbain, péri-urbain/pré-urbain en composition et recomposition permanente au gré des décisions politiques et économiques, individuelles et collectives. Ici la terre juste retournée derrière des dessins d’architectes par delà de nouveaux ronds-points : la ville s’étend. Là une usine tout juste fermée raconte son sommeil par l’ampleur de vastes parkings vides. Le long d’autres routes, les jeunes pousses envahissent des coteaux jadis pâturés, plus loin nous verrons d’immenses hangars et tracteurs.
Tous ces paysages nous racontent les grands équilibres et déséquilibres, ils sont fabriqués par nos choix individuels et collectifs. Il suffit d’ouvrir les yeux et de lire l’étendue alentour pour comprendre non seulement où nous sommes, mais aussi le mouvement en cours, la dynamique, notre temporalité.

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Heureux comme en Europe (1/2), frustrations et humanités

… Dans quel pays est-on le plus heureux ? Où vit-on le mieux ?… Quelle ville offre les meilleures chances de réussite ? Où vos enfants bénéficieront du meilleur cadre ?…
Ces questions ont débordé les Unes de la presse pour constituer une arme d’influence dans la concurrence qui se joue à toutes les échelles entre territoires pour attirer les innovations de rupture et les habitants les plus prometteurs. Et ce sont des pays européens qui font la course en tête.
Au-delà des guerres économiques, ces classements interrogent notre modèle de société : identifier un territoire par sa marque de bonheur pourrait être érigé en « paradigme démocratique ultime ». Le choix de la citation de Shimon Peres en introduction de Best countries. Defining Success and Leadership in The Twenty-First Century en fait la preuve : « Global brands fight discrimination by definition … they have to appeal to everyone. It doesn’t make a difference who you are. They get elected every morning … they are the ultimate democratic paradigm. »[1]

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Depuis Ithaque, de port en port

MAJ 19 juin 2018 :

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6 janvier 2017 :

Trajectoire personnelle (hors indication des voyages d’agrément qui pourtant nourrissent aussi le regard), réalisation Sophie Clairet, janvier 2017

Sophie Clairet

 

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Meilleurs vœux pour 2017

Vue sur Marseille depuis la digue du Berry (voir ici).
Cliché & montage Sophie Clairet, décembre 2017.

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Tout le bleu du ciel et des balcons sur Marseille

Images inspirées par l’archipel du Frioul (1). Bleu de la mer, bleu du ciel, pierres blanches aux flancs du site le plus sec de métropole, à seulement deux milles nautiques de la troisième aire urbaine de France. Sur cet archipel, les forts et les batteries militaires érigés depuis François Ier composent aujourd’hui de sauvages balcons sur la Méditerranée.
Il fallut jadis arrêter les barbaresques, protéger Marseille comme la surveiller, mettre en quarantaine les navires et empêcher les ennemis d’accoster. Sur ce dernier bastion de nature sauvage aux portes de Marseille, la quiétude relègue la guerre bien loin en Orient, mais les pierres parlent encore de contrôle et de blessures de paix. Pour le pire mais aussi pour le meilleur. Il n’est pas interdit de penser qu’en effet le statut de terrain militaire les aura protégées d’un bétonnage touristique intensif et que la présence de forts en aussi grand nombre sous une aussi belle lumière offre le mérite de faire méditer sur l’art et la manière de faire la paix.

Depuis l’île de Pomègues sur l’archipel du Frioul, vue sur les Goudes (langue de terre qui s’abaisse dans la mer à gauche du cliché) et l’île Maïre, autrement appelée île Peyro (2). Cliché Sophie Clairet, décembre 2016.

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Instantanés du front de la propagande

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Capture d’écran du communiqué de presse mis en ligne sur le site du Parlement européen le 22 novembre 2016.

Le 23 novembre 2016, le Parlement européen a voté la « Résolution sur la communication stratégique de l’Union visant à contrer la propagande dirigée contre elle par des tiers ». Sur la base du rapport remis par l’eurodéputée conservatrice Anna Elżbieta Fotyga, ancienne ministre des Affaires étrangères de Pologne, cette résolution attire l’attention de la Commission européenne, des États membres et de l’OTAN sur les propagandes venues de Russie et de l’EIIL/Daech (dans cet ordre de présentation).

Dans le texte : le Parlement européen « 1. souligne que la propagande hostile contre l’Union européenne prend diverses formes et utilise divers outils, souvent conçus de façon à correspondre au profil des États membres, dans le but de déformer la vérité, d’instiller le doute, de diviser les États membres, d’entraîner un découplage stratégique entre l’Union européenne et ses partenaires d’Amérique du Nord, de paralyser le processus décisionnel, de discréditer les institutions de l’Union et les partenariats transatlantiques – dont le rôle dans l’architecture de sécurité et économique européenne est reconnu – aux yeux et dans l’esprit des citoyens de l’Union et des pays voisins, et de saper le discours politique européen fondé sur des valeurs démocratiques, les droits de l’homme et l’état de droit ; rappelle que l’un des principaux outils utilisés est l’incitation à la peur et à l’incertitude chez les citoyens de l’Union, ainsi que l’exagération de la puissance des acteurs étatiques et non étatiques hostiles; fait remarquer que d’autres régimes autoritaires dans le monde utilisent des stratégies semblables à celles élaborées par le Kremlin; ».

Après quinze année marquées par les images d’une « guerre contre le terrorisme » qui poussa sur les ruines du World Trade Center, l’Europe entend se protéger contre de nouvelles images. Les premières venaient de CNN et d’Hollywood – pour schématiser – les nouvelles sont portées aussi par YouTube et consorts.

Top 10 des chaînes YouTube

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Le premier graphique donne une idée du profil des diffusions de masse : musique, programmes pour enfant, programmes trash. Certaines de ces chaînes ont ouvert des filiales, diversifié leurs langues et adapté leurs contenus aux cibles. D’ailleurs le 29 novembre 2016, France Inter invitait la rédactrice en chef de BuzzFeedFrance pour promouvoir « un virage d’enquête et d’info ».

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Si l’on rapporte le nombre de vues à la population du pays d’origine des chaînes YouTube, le classement se trouve substantiellement modifié. Les Pays-Bas et leurs quelques 16 millions d’habitants sont capables de faire la chaîne Spinnin’Records qui engrange plus de 9,3 milliards de vues sur des vidéos musicales qu’elle produit (par exemple Martin Garrix à ses débuts). Sur ce type de graphique, les Russes performent davantage que des Américains qui maîtrisent pourtant les tubes et le véhicule principal, l’anglais. Get Movies et Mashamedvedtv doivent leur classement au dessin animé Masha et Michka. Le 17e épisode diffusé en janvier 2012 sur la première a été visionné plus d’1,8 milliard de fois (en date du 29/11/2016), si bien que la seconde porte la diffusion des épisodes en HD depuis 2013.

Compte tenu de la résolution du Parlement européen

> Est-ce que Spinnin’Records va agrémenter ses vidéos musicales d’images d’une Europe unie et indépendante de stratégies étrangères ? Autrement dit est-ce que l’Europe peut prendre conscience qu’elle abrite des capacités d’influence avérées – et se placer dans une logique proactive.

> Est-ce que la petite fille et l’ours du dessin animé russe Masha et Michka seront interdits ? Autrement dit est-ce que l’Europe entend répondre à la propagande en tuant des ours – et se placer dans une logique de censure et d’embargo.

> In fine qui va agir pour l’Europe, et l’Europe, c’est qui ?

Bons baisers d’Europe, Madagascar 3. Notes prises au cinéma en juillet 2012

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« Les enfants dans la salle n’ont pas tellement rigolé, les parents non plus, à part à deux ou trois reprises, rien à voir avec une explosion de rires. Je n’ai pas ri, certes, je prenais des notes et du coup je ne suis pas rentrée à fond dans les images. C’est un vrai festival, le tigre russe antipathique qui apparait chaque fois avec les chœurs de l’armée rouge, incapable de sortir des héritages du passés, la loutre italienne qui négocie avec le lion US et le tigre russe, la belle « léopard » (je ne sais pas si c’était un léopard) italienne qui les convainc de s’entendre et passe du Russe à l’Américain. Le cirque s’arrête à Rome poussiéreuse dans ses ruines où il rate tout, dans les Alpes suisses où tout repart, puis à Londres (il est écrit Europower sur la tente du chapiteau) où il « casse la baraque » et se fait repérer par un producteur US, avant de partir à NY. Au début, le chef c’est le tigre russe has been. Le numéro est nul, fait fuir tous les spectateurs à un point tel que le cirque s’enfuit en laissant l’argent de la recette (les singes africains envoient les billets en l’air). Numéro raté, musique d’avant le Déluge. A la fin, le lion américain est le boss reconnu par tous. La France, « ici on ne travaille que 15 jours par an » (dans la bouche des pingouins commandos US qui expliquent pourquoi à peine posés au sol, les singes africains s’enfuient dans la nature malgré le contrat signé qui leur demande de travailler). Tout ce que veut la méchante, c’est à dire la capitaine française Chantal Dubois, qui se transforme en araignée pour pister les gentils, c’est accrocher la tête du lion à son mur. « Elle est chtarbée », « la psychopathe nous rattrape ». Elle essaie de se mettre la police italienne dans sa poche en chantant du Piaf là ou le lion US remet tout en ordre avec un spectacle 3 D bluffant et de la musique carrément « fun ». Elle pleure des larmes noires de son maquillage qui coule, finit dans une caisse avec les policiers qui ont eu la bêtise de la suivre, expédiée depuis NY direction Madagascar pendant que le cirque européen/US/russe part à l’aventure sur une formule renouvelée où grâce au lion US, le tigre russe a retrouvé l’envie de vivre. Chantal Dubois n’est pas au niveau de l’attirail des pingouins US avec leurs armes super sophistiquées, elle n’a que la seringue hypodermique et sa méchanceté. »

Sophie Clairet

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Faire & savoir faire savoir : l’Islande au top de l’efficacité

Vignette de présentation de Sveinn Birkir Björnsson, directeur des publications de l'agence de promotion de l'Islande.
Vignette de présentation de Sveinn Birkir Björnsson, directeur des publications de l’agence de promotion de l’Islande.

Le 19 octobre 2016, EFFIE, le prestigieux Grand Prix de la campagne de communication la plus efficace a récompensé l’agence The Brooklyn Brothers & Íslenska pour Ask Guðmundur: World’s First Human Search Engine. Depuis le lancement début 2015 de cette campagne, sept Islandais répondant à l’un des prénoms les plus répandus du pays – Guðmundur ou Guðmunda, d’âges variés et localisés dans les régions d’Islande répondent directement aux questions des touristes étrangers (cible du marché en plus forte croissance en Islande). Quelle est la température de l’eau, y a t’il des forêts, peut-on venir avec des enfants, etc. Les vidéos réponse postées sur la chaîne YouTube dédiée font la part belle aux paysages sans fioriture, « les secrets » du pays sont à portée d’humain.

EFFIE récompense pour la deuxième fois la promotion de l’Islande. Déjà la marque Inspired by Iceland (la maison mère) avait reçu l’or en septembre 2011. Cette nouvelle couronne démontre que cinq ans après son lancement, Inspired by Iceland fonctionne effectivement comme un cadre de promotion concret de l’Islande. La campagne Barcelona Inspira lancée en 2015 puis la marque Inspire Metz dévoilée mi-octobre 2016 font comprendre que ce succès venu d’un petit territoire insulaire aux marges de l’Europe suscite l’envie. Pour autant il y a loin entre l’original et les copies, Inga Hlín Pálsdóttir, directrice Visit Iceland & Creative Industries rappelle :

« It’s important to understand that the country is the brand itself »

En effet, le territoire islandais nourrit l’image de promotion (branding, marketing…) et la leste d’une charge permettant de faire caisse de résonance à un projet politique. L’un de ses ingrédients, les débats portés par le tout jeune Piratar (Parti pirate) devenu la troisième force du pays hier aux élections législatives du 29 octobre 2016, constitue la filigrane d’Ask Guðmundur: World’s First Human Search Engine.

Efficacité

Le jury d’EFFIE estime que « grâce à leur approche humoristique et une solution créative fondée sur l’importance du savoir ancré dans le local et l’humain, ils ont généré la croissance la plus forte et la plus rapide que le secteur touristique islandais ait jamais réalisée ». Cette campagne de promotion se distingue dans les catégories de la meilleure démonstration d’efficacité intégrée, David vs. Goliath et Petit budget.
Et de fait, le tourisme est devenu le principal pilier de la croissance économique de l’Islande, laquelle s’élève à 4% par an. Le nombre de touristes est en hausse de 20% par an et atteindrait 1,7 million en 2016 – soit plus de quatre fois le nombre total d’habitants. Les statistiques détaillées figurent dans les registres du FMI, de l’OMC, du Cia Factbook, etc.

Signification politique

L’un des prénoms les plus répandus d’Islande, Guðmundur, est donné à un système d’information qui représente l’inverse de ce qu’offre Google. Déjà, un mot pareil défie les canons du référencement ne serait-ce que par sa graphie autochtone et non anglaise. La presse n’a pas manqué de souligner une alternative à Google dès 2015 :  » En effet, les ­internautes sont souvent autant à la ­recherche de conseils que de faits. L’Islande l’a d’ailleurs parfaitement compris en lançant en mai son initiative de « moteur de recherche humain ».  » Même ton sur les sites spécialisés dans le tourisme : « Fini les réponses froides et mécaniques de Google »
Barack Obama en visite officielle sur l’île le 13 mai 2016 qui s’interroge sur le nombre des Guðmundur, a bien compris la tonalité et engage la joute :

Guðmonda du sud de l’île, une jeune femme en tenue de football en ces temps d’Euro2016, lui répond que parfois même les présidents ont besoin de Guðmundur, avant de faire rebondir le ballon et de laisser tomber son micro pour vaquer à d’autres occupations :

Au printemps, cet échange d’amabilités se déroule sur fond d’ascension du Parti pirate dans l’opinion publique islandaise. Ask Guðmundur n’a strictement rien à voir avec la promotion d’une activité touristique par l’esthétique, d’ailleurs les paysages jouent sur la rugosité du réel et non sur un univers onirique de mannequins filiformes. Bien davantage, elle arbore l’identité islandaise comme étendard de ralliement, c’est au tour du pays tout entier de faire « marque ».

L’élément d’une chaîne

Les observateurs politiques annoncent depuis plusieurs mois une avancée significative du Parti pirate islandais aux élections législatives du 29 octobre. Après avoir conquis en 2013 trois sièges d’un Parlement qui n’en compte que 63, le jeune parti créé en 2012 a notamment profité du scandale suscité par la révélation des Panama Papers en avril 2016. Le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson avait été poussé à la démission par la descente dans la rue de 20 000 Islandais, tandis que Birgitta Jonsdottir, ancienne porte-parole de WikiLeaks, co-fondatrice du Piratar et député renforçait davantage sa position.

Visuel d'Iceland Academy; la nouvelle campagne de promotion qui permet de gagner des séjours.
Visuel d’Iceland Academy, la créa islandaise de 2016 qui forme les touristes et leur fait gagner des séjours.

Le moteur de recherche d’informations humain Guðmundur n’est que l’élément d’une chaîne. Un an après l’avoir lancé, Inspired by Iceland s’est doté d’une Iceland Academy pour informer (ndlr) former les touristes désireux de visiter le pays. Voilà une logique imparable : après l’information, la formation par des gens du cru. Répondre correctement aux évaluations permet de gagner des écussons – finalement il s’agit de clés métaphoriques – puis un séjour garanti comme 100% hors des sentiers battus. Les visiteurs qui auront adopté la démarche initiatique se détourner de « Google », demander aux guides locaux, avoir l’humilité de se former, etc. en verront davantage. Voilà, l’île quasi-déserte battue par les vents s’accordera le luxe de sélectionner les touristes dignes de la visiter. Il le faudra bien car l’Islande, dépassée par le succès de ses campagnes de promotion, est saturée au sens propre et les lslandais disparaissent du paysage.

A l’autre extrémité du modèle, l’approche symétriquement inverse a démarré dans les nouvelles régions et métropoles françaises en plein essor. On prend l’habitude ici qu’une « marque de territoire » sans identité territoriale assumée, voire sans signification claire autre qu’une musique « qui sonne bien » et en appelle à la fierté d’en être, soit fièrement présentée comme solution pour faire émerger un territoire produit contre la concurrence. Quel est le projet politique à décoder dans les marques Onlyon, SoToulouse, Osez Bordeaux ? Gagner en ostracisant une autre ville ?

Sophie Clairet